Mercredi 6 juin. Suite à une invitation lancée au dernier moment, nos pas nous mènent au sous-sol du Silencio, le mythique (et très privé) club parisien fondé par David Lynch. Déco noir et or, public tiré à quatre épingles, et pour théâtre de la soirée, une petite scène comme une alcôve, cachée par un rideau. Au bout d’un long moment, alors que la lumière devient plus tamisée encore, les pans de tissu s’écartent pour révéler trois jeunes femmes vêtues de lourds kimonos au style moderne, discrètement posées dans un espace à peine assez grand pour elles. Alors que s’égrainent quelques notes de musique d’instruments à corde, les voix des jeunes femmes rompent la solennité de l’espace, dans une étrange atmosphère digne d’un passage de Mulholland Drive – décalage de réalité oblige.

Kayo, Akane et Ao n’interpréteront pas de pop japonaise ce soir-là, mais quelques titres d’un genre bien différent : de l’enka – sortes de balades romantiques, que l’on rapproche habituellement du fado portugais. Généralement cantonné aux émissions télé rétro et au karaoké enivré du bout de la nuit, l’enka est chanté ce soir-là de manière touchante par les trois jeunes femmes, que l’on sent émues. Et puis il y a ces voix. Ces trois voix auxquelles on n’est finalement pas habitués, puissantes et profondes, et qui transmettent toute l’émotion de paroles prononcées dans un langage étranger, mais qui n’a pour l’heure pas besoin de traduction. Ce qui touche l’âme, aussi, c’est le chant en kobushi – un style consistant à répéter la même syllabe sur plusieurs notes – dont Kayo s’est faite la spécialiste. Comme un trémolo qui viendrait vriller le cœur.
Parmi les titres, on retiendra Kome (le riz), premier single du groupe. Et aussi une reprise entraînante d’Ue o Muite Arukô, le hit des années 70 de Kyu Sakamoto, introduit en contrebande aux USA sous le nom de Sukiyaki (sic).
L’enka avait déjà fait sa révolution après guerre au Japon. On est contents de le retrouver dans une version contemporaine, incarné dans ces trois bouts de femmes, de la plus belle des manières.
Pour en savoir plus :
Kome, disponible sur iTunes.
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