Les journalistes Pamela Valente et Pascal Bagot sont partis au Japon à la découverte de l’irezumi, la technique traditionnelle de tatouage, toujours pratiquée sur l’archipel. Souffrant encore d’une mauvaise réputation, l’irezumi est trop souvent associé à la yakuza, la pègre nippone. Pourtant, tous les yakuza ne sont pas tatoués… et tous les tatoués ne sont pas yakuza !
Durant 70 minutes, La voie de l’encre va nous entraîner à la découverte de l’art du tatouage au Japon, à travers ceux qui le font et l’apprécient. En tête, le maître artisan Horitoshi I, qui a tatoué le dos de Pascal pendant des années – il faut parfois 3, 6, 10 ans pour couvrir un corps de motifs. L’occasion de nous faire découvrir l’excellence nippone dans un domaine artisanal bien particulier.
Interview flash de Pascal Bagot
Asian Winds : Bonjour Pascal. D’où t’est venue l’idée de ce reportage ?
Pascal Bagot : L’idée a pris forme deux ans après que j’aie commencé à venir me faire tatouer à Tokyo chez Horitoshi I. La découverte du tatouage japonais a été un choc culturel très fort pour moi en même temps qu’un véritable coup de foudre pour son travail. Evidemment, j’ai eu envie de partager cette émotion très forte. Au fil de mes voyages, j’ai découvert un univers très confidentiel et secret qui me fascinait. Elle excitait aussi ma curiosité de journaliste. Plus j’en découvrais, plus je souhaitais en apprendre, comprendre comment il fonctionnait et pourquoi le Japon, un pays où l’appréciation de la beauté des choses fait l’objet d’un profond raffinement, était incapable de reconnaître ce qui était pour moi un art magnifique. En même temps je n’étais pas satisfait par les reportages ou documentaires déjà réalisés qui se concentraient pour la plupart sur le rapport du tatouage avec la mafia japonaise. J’avais envie de participer à élargir la vision que l’on pouvait avoir de l’irezumi et à sa reconnaissance par un public plus large. J’ai toujours cette motivation.
Concernant ton tatouage, pourquoi ce choix de technique ? De motif ?
Je n’ai pas choisi la technique, j’ai choisi le tatoueur qui travaillait avec cette technique à la main que l’on appelle tebori. En tombant amoureux du style de Horitoshi I j’ai accepté sa façon de faire. Il est vrai également que l’aspect « traditionnel » et authentique de cette technique ancienne m’a plu. J’ai choisi un motif de dragon parce que c’est une figure qui me fascinait depuis longtemps. C’est beau, c’est puissant, en même temps il y a cette idée de représentation d’une abstraction que j’aime bien – celle d’une énergie vitale, cosmique et protectrice. Et puis Horitoshi I faisant les plus beaux dragons du Japon, il était difficile de résister. J’ai mis un an avant de me décider.
Comment as-tu découvert le travail de maître Horitoshi I ?
J’ai découvert son travail à l’occasion d’une interview faite dans un magazine spécialisé français. J’ai été très impressionné par la puissance qui se dégageait de ses tatouages, par son talent pour l’association des couleurs, la noirceur et la complexité de ses fonds. Mon tatouage, qui a la forme de ce que l’on appelle au Japon un kame no ko (ou « dos de tortue ») recouvre l’intégralité du dos, les fesses et l’arrière des cuisses. Les dernières retouches ont eu lieu l’année dernière, il est donc maintenant terminé. J’ai tenu ma promesse, faite implicitement avec le tatoueur, d’aller jusqu’au bout de ce projet.
Quelle est ton actualité en tant que journaliste spécialisé tattoo ? Des projets de reportages à venir ?
Je travaille toujours pour Rise magazine, le meilleur magazine français sur le sujet, dans lequel nous avons récemment publié une longue interview avec la légende du tatouage américain Ed Hardy, lui aussi un passionné du Japon. Je suis en train de tourner un documentaire dont j’ai écrit le synopsis pour une chaîne TV française qui recroise le développement de la culture tattoo et de la culture de la musique metal, dont je suis aussi fan, à travers des interviews de musiciens, de tatoueurs et de tatoués. Le film devrait être prêt à la fin de l’année. Je croise les doigts pour que tout se déroule comme prévu, vous pouvez vous attendre à un sacré morceau !